"... La lueur des lampadaires, dont l’orangé teintait la nuit d’une nuance sépia, s’accordait assez bien avec la mélancolie, à la fois triste et douce, qui m’avait absorbé. J’errai longtemps, sans éprouver de fatigue, de petites rues sombres en petites rues sombres ; coupe-gorge étroits et déserts où s’exprimait encore, en effluves nauséabonds, le passé marin de la cité, et où, privilège de mendiant, je pouvais marcher sans crainte. Mes pas me menèrent vers le fleuve, juste au bord de ses eaux qui clapotaient doucement contre les quais.
Une brume épaisse s’était levée et avait graduellement effacé tous mes points de repères : je m’aperçus que je n’avais aucune idée du lieu où je me trouvais. Je pris cependant rapidement conscience que cet endroit avait quelque chose d’intrinsèquement différent ; différence subtile à laquelle je ne pus trouver ni définition ni explication. Égaré et impuissant, je me contentai de ne penser à rien et de m’imprégner de l’ambiance qui régnait autour de moi. La métropole était immense. Je ne la reconnaissais pas mais la sentais palpiter autour de moi, à la fois familière et énigmatique ; comme la rivière, ondulante et suprême, grosse d’ombres, de souffles et de mystères. Étranger dans un lieu étrange, je respirai profondément et laissai s’égarer mon regard désorienté. Le brouillard qui, monté de la mer, porté par vents et courants, avait touché la ville de sa fraîcheur iodée, me la révélait, dans la magie de son flou irradié de lumières, comme une vision fantastique et miraculeuse. J’avais la sensation d’être dans un entre-deux à la fois réel et fabuleux. Je pensai à la Cité des hommes et à la Cité de Dieu. J’étais perdu et cela me parut délicieux."
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Bonnes vacances à tous et, je l'espère, bonne lecture ! :)