Un béret, plein d'espace pour s'auto-analyser... mais pas de vin rouge ! // A béret, plenty of space for self-analysis... but no red wine! |
EN FRANÇAIS: (CLICK HERE FOR ENGLISH VERSION)
Pourquoi la majorité des romans français ne se vendent pas en Grande-Bretagne.
La semaine dernière, trois semaines -- non deux! Oh my God! -- avant la publication de mon roman en France, j'avais décidé de publier sur ce blog un court entretien où je parle de ce qui est la clé de mon inspiration : le désir d'écrire un livre qui transporte le lecteur dans un monde qui est le nôtre, mais avec des dimensions ajoutées pour son plaisir de lecture et pour l'aider à ouvrir les portes de sa propre créativité (son pouvoir d'imaginer). Le fait de tomber par hasard sur un article de journal intéressant m'a fait légérement changer de plan: je vais toujours publier mon interview (c'est d'ailleurs fait!) mais je vais y ajouter le billet qui suit.
Il semble hélas presque cliché de dire que la vie en ce moment n'est pas facile (l'a-t-elle jamais été?) mais il est indéniable que l'environnement économique sombre, l'insécurité générale (au mieux latente) et la mort de bien de nos rêves créent en nous un profond besoin de mieux ou, à défaut de mieux, d'ailleurs. Ce billet n'est pas une ode à la magie des livres, mais il n'en est pas loin.
En surfant l'internet (éblouissante caverne d'Ali Baba mais aussi trou noir qui s'attaque à la trame même du temps pour toute personne qui écrit!), je suis tombée sur un article fascinant du Guardian, un grand quotidien anglais.
Cet article essayait de comprendre pourquoi des livres qui faisaient un carton en France n'intéressaient que très mollement (ou pas du tout) le public anglais. Depuis des années, je me pose la même question et me demande pourquoi la France, si littérairement lumineuse dans le passé, n'est plus qu'une vague lueur dans la voie lactée de la production artistique mondiale (à part pour ce qui est de son cinéma).
L'auteure de l'article, très mesurée et pas du tout accablante dans son analyse, cite plusieurs experts et, à travers eux, met en valeur certains aspects qui, je le crois, méritent vraiment d'être considérés.
D'abord, le manque d'intérêt de beaucoup d'écrivains à la mode en France pour l'art de raconter une histoire qui donne envie au lecteur d'en savoir plus, privilégiant au contraire des considérations plus intellectuelles et abstraites que le plaisir de lire. Ce que je trouve étonnant à ce propos c'est que nos grands écrivains du passé mélangeaient avec bonheur les séductions d'une histoire passionnante avec des refléxions sociologiques ou philosophiques profondes. L'une n'était pas sacrifiée aux autres. Pour moi, cela devrait toujours être le cas, la richesse du contenu d'une lecture ne devrait pas exclure le plaisir de cette lecture. Il me semble que par bien des aspects le post-modernisme de l'après-guerre (préconisant la mort de l'histoire et de l'Histoire, etc.) n'a pas été dépassé en France, ce qui la bloque dans une impasse étroite d'auto-censure et d'auto-référence.
A ce sujet, l'auteure de l'article aborde aussi la tendance très française de «l'auteur-protagoniste», qui se raconte dans les moindres détails ou se met en scène infatigablement en tant que personnage principal -- une forme d'égocentrisme qui dans mon expérience n'est pas en harmonie avec le tempérament anglo-saxon.
L'article se termine sur un argument (pour moi) de poids, qui me prouve (s'il en est besoin!) combien, malgré mon âme à jamais française, ma tête et mon coeur doivent être devenus anglo-saxons:
«Ruppin estime que la chose la plus importante pour la majorité des lecteurs britanniques est l'histoire et la capacité d'empathie avec les protagonistes de l'histoire. "Que notre fiction nous questionne sur les prémisses de notre culture n'est pas nécessairement ce que nous recherchons, alors que c'est peut-être le cas pour les Français. Le cliché est d'un homme coiffé d'un béret, avec une cigarette et du vin rouge, délibérant sur le sens de la vie jusque tard dans la nuit - ce n'est pas la façon de faire britannique." »
«Ruppin estime que la chose la plus importante pour la majorité des lecteurs britanniques est l'histoire et la capacité d'empathie avec les protagonistes de l'histoire. "Que notre fiction nous questionne sur les prémisses de notre culture n'est pas nécessairement ce que nous recherchons, alors que c'est peut-être le cas pour les Français. Le cliché est d'un homme coiffé d'un béret, avec une cigarette et du vin rouge, délibérant sur le sens de la vie jusque tard dans la nuit - ce n'est pas la façon de faire britannique." »
N'est-il pas grand temps pour la France de se recréer une place dans la littérature mondiale?
PS: L'ironie pour nous Français est que notre marché du livre est envahi de traductions de best-sellers anglo-saxons, que le public dévore, et que les grands éditeurs favorisent souvent au détriment de nouvelles voix françaises.
PS: L'ironie pour nous Français est que notre marché du livre est envahi de traductions de best-sellers anglo-saxons, que le public dévore, et que les grands éditeurs favorisent souvent au détriment de nouvelles voix françaises.
Why most French novels leave the British public cold.
Last week, three weeks -- no, two! OMG! -- before the publication of my novel in France, I had decided to publish on this blog a short interview where I talk about the key to my inspiration i.e. the desire to write a book that transports the reader into a world like ours, but with added dimensions for their reading pleasure and also to help them open the doors of their creativity (their own power to imagine). A chance encounter with an interesting newspaper article has slightly altered my plan: I’m publishing the interview but also this here post.
Unfortunately it seems almost cliché to say that, at the moment, life is not easy (has it ever been?) but it is undeniable that the bleak economic climate, the general insecurity that is latent at best, and the death of many of our dreams, create in us a deep need for something better or, at least, for something else... This post isn’t an ode to the magic of books, but it's pretty close.
While surfing the net (for most writers, a mixed blessing, as it's both a wondrous Ali Baba's cave and a black hole that attacks the very fabric of time!), I came across a fascinating article in the Guardian (a major British daily).
This article was trying to understand why French books that had done very well in France were welcome with only very weak (if any) interest by the British public. For years, I’ve asked myself this same question of why France, though an international literary bright light in the past, is no more now than a dim glimmer in the Milky Way of the artistic world (except for its films).
The author of the article, who is very measured and not at all damning in her analysis, quotes several experts and, through them, highlights certain aspects which, to me, really deserve to be considered.
First, the lack of interest in many French fashionable authors for the art of story telling (that which gives the reader the desire to learn more), preferring instead concerns of a more intellectual and abstract nature to the pleasure of reading. What I find amazing about this is that our great authors of the past mixed gleefully the seductions of a good story with profound philosophical or sociological insights. The one was not sacrificed to the other. For me, this should still be the case, the richness of a book's content should not exclude the pleasure of reading it. I think that this point illustrates the fact that in many ways France has not yet gone beyond its post-war postmodernism (which advocated the death of story and history, etc.) and that as a result its literature is stuck in a narrow dead-end of self-censorship and endless self-referencing.
Following on this, the author of the article also addresses the very French tendency of the "author-protagonist", who describes his/her life in great detail and tirelessly portrays himself/herself as the main protagonist - a form of egocentricity that, in my experience, is not in harmony with the Anglo-Saxon temperament.
The article ends with a strong and valid statement, which proves to me (if needs be!) how, despite my ever French soul, my mind and heart have truly become Anglo-Saxon:
“Ruppin believes that the most important thing for the majority of British readers is storyline, and the ability to empathise with protagonists in the story. ‘Being asked in our fiction to question the whole premise of our culture is not necessarily what we're looking for, whereas maybe the French are. The cliché is of a man in a beret with a cigarette and red wine deliberating the meaning of life deep into the night – that's not the British way.’”
Isn't it high time for France to recreate a place for itself in the international literary world?
PS: The irony for us, French people, is that our book market is absolutely swamped with French translations of Anglo-Saxon best-sellers, which the public devour and which the big publishers often favour at the expense of giving a chance to new French voices.
Si seulement les écrivains français arrêtaient de se regarder le nombril... Autre question que je me pose: bon nombre de best-sellers qui plaisent aux lecteurs européens sont introuvables / déclassés en France... La France fermerait-elle ses frontières à la littérature étrangère pour être sûre de vendre sa production nationale puisque la littérature française actuelle n'a pas de succès à l'étranger???
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